Premières sépultures musulmanes médiévales en France

Dans la revue Plos One a été publié le premier témoignage archéologique et anthropologique de la présence musulmane en France par des chercheurs bordelais, notamment du laboratoire Pacea, du Centre de génomique fonctionnelle de Bordeaux, et de l’Inrap.

  • 26/02/2016

© Patrice Pliskine, Inrap © Patrice Pliskine, Inrap

Au début du Moyen Âge, la rapide conquête arabo-islamique a entraîné de profonds changements politiques et culturels dans le monde méditerranéen. Si la présence musulmane au sein de la péninsule ibérique à l’époque médiévale est aujourd’hui mieux documentée grâce aux sources archéologiques et historiques, son expansion en France ne l’a été, jusqu’à présent, qu’à partir de sources textuelles datées du 8e siècle, ou de rares données archéologiques.

Des chercheurs bordelais de deux structures différentes : laboratoire Pacea (De la préhistoire à l'actuel : culture, environnement, anthropologie, unité CNRS, université de Bordeaux et ministère de la Culture et de la communication), et deux laboratoires du Centre de génomique fonctionnelle de Bordeaux : le Centre de bioinformatique de Bordeaux (CBiB) et la plateforme Génome-transcriptome de Bordeaux (PGTB) ainsi que des chercheurs de l'Inrap publient cette semaine dans la revue Plos One, le premier témoignage archéologique et anthropologique de cette présence musulmane en France, durant le premier Moyen Âge.   

Trois sépultures

Préalablement à la construction d’un parking souterrain à Nîmes, avenue Jean-Jaurès, les fouilles réalisées par l’Inrap ont mis en évidence un quartier résidentiel antique de la cité, ainsi qu’une vingtaine de sépultures. Parmi celles-ci, trois inhumations d’hommes se distinguent par la position du corps des défunts, déposés sur le côté droit, la face orientée vers le sud-est. La position du corps, la tête orientée vers la Mecque comme le dépôt direct dans une fosse sont des caractéristiques évoquant les rites musulmans. Dans deux sépultures, la forme du creusement des fosses présente un surcreusement latéral qui n’est pas sans rappeler le dispositif « al-lahd » de la tradition musulmane.  

Sépulture musulmane, fouille du parking Jean-Jaurès, à Nîmes  © Marie-France Bernard, Inrap

Une recherche multidisciplinaire

La réalisation de plusieurs datations radiométriques sur les trois individus permet d’en préciser l’âge : entre le 7e siècle et le 9e siècle de notre ère. Ces données archéologiques font échos à des sources historiques qui documentent cette présence musulmane durant la première moitié du 8e siècle. Ainsi, la Chronique de Moissac attesterait l’existence de musulmans à Nîmes, dès 720.
Au vu des premiers résultats et afin d’en savoir plus sur l’identité des individus, une analyse paléo-génétique vient d’être entreprise. Les résultats plaident en faveur d’une origine nord-africaine de ces trois individus, du moins en ce qui concerne leur lignée paternelle. L’ensemble de ces données suggère que les squelettes découverts dans les tombes de Nîmes appartenaient à des soldats berbères enrôlés dans l’armée omeyyade durant l’expansion arabe en Afrique du Nord. Non seulement cette découverte apporte les premières données anthropologiques et génétiques sur l’occupation islamique du territoire wisigothique de la Septimanie (sud de la Gaule), mais elle souligne également la complexité de la relation entre les deux communautés durant cette période.

Sources : Inrap

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