Covid-19 : les étudiants en santé bordelais engagés dans la gestion de la crise sanitaire

L’épidémie de Coronavirus mobilise l’ensemble du système de santé. Face à cette crise inédite, les soignants ont besoin d’aide. A Bordeaux, les étudiants en santé se sont naturellement engagés pour apporter leur soutien aux professionnels. Une chaîne de solidarité ultra efficace.

  • 20/04/2020

L'équipe mobile de dépistage #COVIDー19 des étudiants en santé © DR L'équipe mobile de dépistage #COVIDー19 des étudiants en santé © DR

Depuis le 17 mars, deux petites salles du rez-de-chaussée du Groupe Hospitalier Pellegrin ont été investies. Chaque jour, des dizaines d’étudiants en santé s’y relaient. Masqués et concentrés derrière l’écran de leur ordinateur, ils animent les deux plateformes mises en place par le CHU pour soutenir et renforcer la chaîne du système de soins.

Plusieurs centaines d’étudiants volontaires

Dès le début du confinement, plusieurs centaines d’étudiants ont été recensés via une liste partagée entre le collège santé de l’université de Bordeaux et le CHU. Comme l’explique le professeur Jean Luc Pellegrin, directeur du collège santé : « Lorsque l’université de Bordeaux a fermé, les internes en année recherche qui travaillaient dans les laboratoires se sont trouvés disponibles. Par ailleurs, le CHU en réorganisant ses services pour s’adapter à l’urgence du Covid-19 a également libéré un certain nombre d’internes et d’externes. Ce pool de futurs professionnels de santé, qu’ils soient étudiants en médecine, pharmacie, odontologie ou en formations paramédicales constitue les forces vives de ce dispositif. Mais il faut rappeler que cet engagement n’est possible que parce que les autres internes et externes assurent toujours leurs missions de base dans tous les services, en particulier aux urgences, en réanimation et dans les unités prenant en charge des patients Covid-19+. »

Répondre aux questions des médecins

Aussitôt le confinement annoncé, une cellule Covid-19 a été mise en place sous la direction du docteur Mathilde Pugès autour de la plateforme Ville Hop. Internes en médecine, pharmacie, odontologie ainsi que des paramédicaux (infirmiers, diététiciens...) répondent aux questions des médecins libéraux et aux différents professionnels des établissements de santé d’Aquitaine.

« Les internes sont encadrés et coachés par 2 médecins du CHU. Nous avons mis en place une FAQ quotidienne dans laquelle émerge chaque jour des réponses que nous formalisons et partageons au cours du débriefing quotidien. Les demandes évoluent au fil du temps. Chacun fait de la veille, s’informe, recherche des données pour conseiller et orienter au mieux les interlocuteurs » explique Charles Cazanave médecin infectiologue au CHU et très impliqué dans ce dispositif.

Aider la prise en charge à domicile des patients

Parallèlement, la plateforme Rafael - cellule Covid-19 dirigé par le docteur Irène Machelart met à la disposition des médecins généralistes et de leurs patients Covid- 19 positifs ou suspectés, une interface numérique et téléphonique pour aider la prise en charge à domicile. « C’est une équipe d’une quarantaine d’externes encadrée par 3 séniors (chefs de clinique ou praticiens hospitaliers) qui à tour de rôle surveillent à distance les patients inscrits sur la plateforme par leur généraliste. Chaque jour, ces étudiants suivent l’évolution des symptômes via des questionnaires en ligne et des appels téléphoniques personnalisés.

A ce jour près de 900 patients ont été suivis » précise le professeur Pellegrin. « Ces jeunes sont particulièrement réactifs et rigoureux, c’est très rassurant » raconte une patiente.
Par ailleurs, le suivi des patients concernés par l’essai clinique COVERAGE récemment lancé par le CHU et l’université de Bordeaux va être assuré par une partie de ces internes et de ces étudiants. 

Actifs également sur le terrain

Parce que parfois la présence physique est indispensable et que les EHPAD ont besoin de renforts humains, Charles Cazanave supervise des « équipes mobiles de gériatrie » composées d’internes de diverses disciplines (dont un gériatre et un hygiéniste). « L’objectif de ces équipes est d’apporter aux EHPAD un soutien médical et en matière d’hygiène mais aussi de dépister les résidents et les soignants. Les EHPAD nous contactent via la plateforme et nous déplaçons après avoir évalué la situation » déclare l’infectiologue. Chaque semaine, du lundi au samedi inclus, plusieurs établissements sont ainsi visités. « Sur le même principe, nous avons aussi commencé à dépister les étudiants les plus exposés sur les campus, à l’espace santé étudiants » ajoute t-il.

Sans oublier la trentaine d’externes en odontologie accompagnés par 16 internes en médecine générale qui aident à la régulation du SAMU, les étudiants en 5e année de pharmacie qui distribuent des médicaments ou sont à la disposition de la pharmacie du CHU, les volontaires sillonnant les cités universitaires afin de livrer produits alimentaires et médicaments aux étudiants en difficultés… ou ceux qui vont récupérer les dons de matériels (blouses, masques…).

L’engagement de tous ces jeunes volontaires est fantastique.

Jean Luc Pellegrin —

Motivation, émulation, esprit d’équipe, solidarité, adaptabilité, réactivité, humanité, pluridisciplinarité… « Le Covid-19 est une pathologie qui fédère comme jamais, témoigne Charles Cazanave. Chacun trouve du sens à son action quelle que soit sa discipline. Cela permet aussi d’apprendre à mieux se connaitre et travailler ensemble dans un but identique : faciliter la gestion des malades. » Le professeur Pellegrin quant à lui remarque que cette situation exceptionnelle est révélatrice de talents, « en période de crise, les codes sont cassés, la compétence est partout, tout le monde travaille ensemble, c’est une nouvelle façon d’appréhender la médecine et de faire face à un problème de santé publique ».

#etaprès ?

En fonction de l’évolution sanitaire, les demandes changent, les actions s’adaptent au contexte.
« Dernièrement nous recevons un peu moins d’appels mais tous les jours nous voyons apparaitre de nouveaux besoins auxquels nous nous ajustons en permanence. Après le 11 mai ? D’autres questions se poseront. Jusqu’au mois de juin nous continuerons probablement d’accompagner les médecins » avance Charles Cazanave.
Nul doute que cette expérience collective unique aura de nombreuses conséquences positives et que les compétences de chacun seront renforcées.