Étonnantes découvertes dans la Grotte de Cussac
Des scientifiques, notamment du laboratoire Pacea*, ont récemment publié dans la revue PNAS une étude bioanthropologique de la Grotte de Cussac, révélant des pratiques rituelles et des traditions funéraires vieilles de 30 000 ans.
- 07/07/2020
Vestiges humaines de la Grotte de Cussac en Dordogne © N. Aujoulat, CNP, MCC
Située en Dordogne, la Grotte de Cussac fut découverte en septembre 2000 par Marc Delluc, spéléologue, et classée à peine deux mois plus tard au titre des monuments historiques. Cette grotte ornée du Périgord est décorée avec des restes humains de chasseurs-cueilleurs gravettiens déposés sur le sol. Il y a environ 30 000 ans, juste avant le Dernier Maximum Glaciaire, la culture gravettienne était connue pour son riche art pariétal, ses « Vénus » et ses sépultures élaborées.
Exceptionnellement bien conservés, les dépôts de surface de la Grotte de Cussac illustrent les étapes d'un paysage mortuaire qui sont hors de portée dans les lieux de sépulture plus courants du Paléolithique supérieur. Sacha Kacki et Sébastien Villotte, chercheurs CNRS au laboratoire Pacea, et leurs collègues, décrivent dans un article paru le 15 juin 2020 dans la revue PNAS comment la Grotte de Cussac offre un nouvel aperçu des rites mortuaires de l'époque.
Des restrictions interdisant tout contact avec les sols de la grotte ou les restes humains, les scientifiques ont utilisé des photographies et des modèles photogrammétriques 3D pour étudier les squelettes à distance. Dans une zone profonde de la grotte, les chercheurs ont observé le squelette complet d’un homme et les os mélangés d'au moins deux individus triés anatomiquement dans d'anciennes bauges d'ours. Quatre-vingt mètres plus loin, ils ont identifié les os d'au moins trois individus mélangés. Les crânes semblent avoir été prélevés.

Contrairement à d'autres sites funéraires gravettiens, les sujets de Cussac n'avaient pas de perles placées avec eux et ont été retrouvés bien plus profondément dans la grotte. L'association avec un art pariétal abondant, représenté par plus de 800 gravures, ainsi que les prélèvements de crânes, sont également très inhabituels pour la période. Selon les auteurs, les pratiques mortuaires à Cussac offrent un nouvel aperçu de la complexité des interactions entre les vivants et les morts pour cette culture préhistorique.
Les pratiques funéraires gravettiennes fournissent une perspective clé sur la complexité sociale au cours du Paléolithique supérieur. Ces inférences ont été tirées principalement des sépultures officielles relativement abondantes pour cette période. Ces accumulations osseuses correspondent à plusieurs formes de dépôt (un corps entier, des parties du corps à la surface, et des os secs dans des nids d’ours), ainsi que le déplacement et l’élimination des éléments qui indiquent des comportements mortuaires divers et complexes.
*Pacea – De la Préhistoire à l’actuel : culture, environnement et anthropologie (CNRS, ministère de la Culture et université de Bordeaux)
Référence bibliographique
Kacki S, Trinkaus E, Schotsmans EMJ, Courtaud P, Dori I, Dutailly B, Guyomarc'h P, Mora P, Sparacello VS, Villotte S. Complex mortuary dynamics in the Upper Paleolithic of the decorated Grotte de Cussac, France.
Contacts scientifiques
Sacha Kacki
Chercheur CNRS au laboratoire Pacea
Sébastien Villotte
Chercheur CNRS au laboratoire Pacea