L’université de Bordeaux au cœur du quantique
Lancé en janvier dernier, le plan quantique national entend faire décoller l’écosystème français des technologies quantiques. Innovation, formation, recherche… tour d’horizon de projets bordelais qui explorent le monde de l’infiniment petit aux propriétés surprenantes et prometteuses.
- 02/02/2021
© Alphanov
Le 21 janvier 2021, le président de la République annonçait un investissement de 1,8 milliard d’euros sur cinq ans dans le cadre du « plan quantique », dans l’objectif de faire de la France un acteur majeur des technologies quantiques.
Relevant le fonctionnement souvent étonnant de l’infiniment petit, la physique quantique prédit qu’une particule matérielle peut aussi être simultanément une onde. Elle prédit aussi qu’un atome peut se trouver en plusieurs endroits à la fois, ou encore qu’on ne peut parfaitement déterminer l’évolution d’un objet microscopique, mais seulement estimer ses probabilités d’évoluer dans une certaine direction.
Il y a 100 ans, la recherche fondamentale a ouvert la voie vers la première révolution quantique qui a profondément modifié la société actuelle : transistors, lasers, supraconducteurs, microscopes ultra-puissants… Désormais, c’est à une seconde révolution que les chercheurs et les industriels travaillent.
Ordinateurs plus puissants, systèmes de communication plus sûrs, dispositifs de mesure plus précis qui pourront profondément changer les transports, la médecine, l’exploration ou la surveillance de la Terre… le potentiel des applications est immense. Quant au dévoilement récent du plan quantique, il conforte la stratégie développée au sein des communautés scientifiques françaises, dont celle de l’université de Bordeaux, qui, forte de ses Départements Sciences de la matière et du rayonnement et Sciences de l’ingénierie et du numérique, compte relever le défi et jouer un rôle moteur dans cette nouvelle révolution technologique.
Innovation – Naquidis Center
L’université de Bordeaux, l’Institut d’Optique Graduate School (IOGS), le CNRS et l’université de Limoges, ainsi que le pôle de compétitivité Alpha-RLH et la région Nouvelle-Aquitaine, ont lancé la création du centre d’innovation NaQuiDis. Dans ce nouveau hub en technologies quantiques, seront développés conjointement des projets de recherche au plus haut niveau, des développements applicatifs innovants ainsi que des solutions technologiques sur trois axes : capteurs quantiques, un domaine pouvant s’appuyer sur un écosystème déjà solide incluant un laboratoire commun sur la navigation et la start-up Muquans ; la supply chain quantique qui repose en particulier sur l’excellence de la région dans le domaine de la photonique ; la communication et l’informatique quantique où la photonique rejoint l’informatique et les mathématiques. Ce centre se fédère aussi avec d’autres initiatives, comme le Graduate Program Light Sciences & Technologies, le cluster d’excellence LaPhia (Laser et Photonique en Aquitaine) ainsi que le futur grand programme de recherche LIGHT, ou le programme Quantum Matter Bordeaux.
Le projet est porté par Philippe Bouyer, chercheur CNRS et directeur délégué de l’IOGS à Bordeaux. Les laboratoires bordelais impliqués dans le projet sont le Laboratoire photonique, numérique et nanosciences (LP2N – CNRS, IOGS et université de Bordeaux), le Laboratoire ondes et matière d’Aquitaine (LOMA – CNRS et université de Bordeaux), le Centre lasers intenses et applications (CELIA – CNRS, CEA et université de Bordeaux), l’Institut de mathématiques de Bordeaux (IMB - CNRS, Bordeaux INP, Inria et université de Bordeaux), le Laboratoire de l’intégration du matériau au système (IMS – CNRS, Bordeaux INP et université de Bordeaux) et le Laboratoire bordelais de recherche en informatique (Labri - CNRS, Bordeaux INP et université de Bordeaux).
Un événement de lancement du centre d'innovation NaQuiDis se tiendra, en ligne, le jeudi 4 mars prochain à 15h (inscription et informations en ligne).
Formation – Graduate Program Light Sciences & Technologies
Le Graduate Program Light Sciences & Technologies de l’université de Bordeaux propose un cursus intégré master-doctorat centré sur plusieurs domaines d’excellence scientifique : la génération, la manipulation et la détection de la lumière ; les régimes extrêmes de la lumière ; la lumière dans les technologies quantiques et la biophotonique. L’enseignement transdisciplinaire est axé sur la recherche, avec des périodes de stage intensifs en immersion dans les laboratoires du campus ou dans des services de recherche et développement industriels. Ce programme propose une formation à l’innovation et l’entreprenariat dans le domaine de la photonique et favorise la mobilité internationale (partenariats avec l’INRS au Québec, l’ABS Jena en Allemagne…). Environ 20 doctorants et 70 étudiants en master sont inscrits par an, dont une dizaine d’élèves-ingénieurs suivant le double cursus proposé avec l’IOGS. Depuis sa création il y a 2 ans, 60 % des heures de formation existantes ont été adaptées aux dernières innovations scientifiques et techniques, pour développer d’avantage les formations en anglais et la manipulation des outils de recherche. Le programme se déroule à l'Institut d'optique d'Aquitaine, un site unique qui rassemble enseignement, activités de recherche et start-ups. Brahim Lounis, professeur de l’université de Bordeaux menant ses recherches au LP2N est directeur du programme.
Recherche – Quantum Matter Bordeaux
Fort de sa communauté d’une centaine de chercheurs, Quantum Matter Bordeaux est internationalement reconnu avec des collaborateurs dans 120 institutions étrangères (50% en Europe, 25% aux États-Unis/Canada). Le projet réuni des chimistes, des physiciens et des théoriciens dont la synergie permet de maîtriser la complexité des défis actuels. Cette communauté contribue au nouvel élan de la chimie exploratoire française, avec la prochaine génération de supraconducteurset d'aimants moléculaires à haute température, plus respectueuse de l'environnement (moins toxique et plus durable), mais aussi de matériaux multifonctionnels. En levant des verrous technologiques clefs, elle fait le pont entre les échelles des gaz d’atomes ultra-froids sur réseaux (500 nm) et celle des matériaux quantiques (0.1 nm). Ces développements expérimentaux sur l'étude des systèmes topologiques, magnétiques et opto-mécaniques aux échelles nanométriques sont soutenus par un fort investissement théorique : analytique, numérique, intelligence artificielle… Les perspectives de ces recherches ouvrent sur de nombreuses applications potentielles dans les domaines de la spintronique, de l’électronique et de la simulation quantiques ainsi que des capteurs ultra-sensibles ou du contrôle de réactions chimiques.
Le projet est porté par Ludovic Jaubert, chercheur CNRS au LOMA. Les laboratoires impliqués dans le projet sont le LOMA, le Centre de recherche Paul Pascal (CRPP – CNRS et université de Bordeaux), l’Institut de chimie de la matière condensée de Bordeaux (ICMCB – CNRS, Bordeaux INP et université de Bordeaux), l’Institut des sciences moléculaires (ISM - CNRSCentre national de la recherche scientifique , Bordeaux INP et université de Bordeaux), et le LP2N.
Contacts scientifiques
Philippe Bouyer
Porteur du projet Naquidis Center
Brahim Lounis
Directeur du programme Light Sciences & Technologies