Une formation à l’intégrité scientifique pour les doctorants
L’université de Bordeaux vient de rendre obligatoire pour tous ses doctorants une formation à l’intégrité scientifique : une démarche originale pour un enjeu essentiel dans les métiers de la recherche. Explications.
- 12/06/2017
© everythingpossible - Fotolia
L’intégrité scientifique est une question dont l’université de Bordeaux se préoccupe depuis longtemps. Dés 2002, sous l’impulsion d’Alain Blanchard, une charte avait été adoptée par l’université Bordeaux Segalen comme le rappelle Antoine de Daruvar, professeur de bio-informatique, directeur de l’école doctorale des sciences de la vie et de la santé, à l’origine de ce projet de formation avec Yannick Lung, professeur de sciences économiques.
Au niveau national la convergence des réflexions dans ce domaine a conduit à la signature de « la charte de déontologie des métiers de la recherche » par la Conférence des Présidents d'Universités et les principaux organismes en janvier 2015. Pour préparer la mise en application de cette charte, l’université de Bordeaux a organisé avec la CPU et le Mouvement universel de la responsabilité scientifique (MURS) le colloque « L’intégrité scientifique : parlons-en ! » en janvier 2016.
Depuis mai 2016, un nouvel arrêté demande aux écoles doctorales de faire en sorte que chaque doctorant reçoive une formation à l'intégrité scientifique. C’est chose faite à l’université de Bordeaux qui propose à tous les doctorants une formation développée en concertation avec la CPU, le CNRS, l’Inserm et l’Inra.
Un acte par lequel l’université de Bordeaux affirme sa responsabilité sociétale
L’objectif de cette formation est de diffuser et renforcer une culture de l’intégrité scientifique au sein des établissements du site bordelais. Une diffusion qui passe d’abord par les doctorants, toutes disciplines confondues, afin que dès la thèse puis dans toute leur carrière, les chercheurs adoptent une attitude rigoureuse, éthique et responsable.
« Plus qu’un apprentissage de règles, il s’agit de sensibiliser les doctorants aux différents enjeux associés à l’intégrité scientifique et de favoriser une démarche critique en proposant les éléments de base nécessaires pour comprendre et porter les exigences de l’intégrité scientifique » explique Antoine de Daruvar. A terme, il est prévu que cette formation puisse être suivie par toutes les catégories de personnel impliquées dans la recherche et pas seulement par les doctorants. Rapidement, la validation de la formation devrait devenir un prérequis pour la soutenance d’une habilitation à diriger des recherches.
Offrir un contenu qui puisse être mutualisé
« C’est avec l’aide d’une équipe de la Mission d’appui à la pédagogie et à l’innovation coordonnée par Cécile Garcia, chef de projet, que nous avons conçu et développé cette formation. La loi ne donnant aucune indication de contenu, chaque établissement est libre d’inventer le sien. Nous avons démarré ce projet fin 2015 avec un niveau d’ambition élevé » précise Yannick Lung. « Et nous souhaitons que ce contenu puisse être utilisé par d’autres établissements qui voudraient s’en saisir pour tout ou partie afin de l’adapter à leurs propres besoins. »
Dix-huit mois plus tard, la première promotion des 500 doctorants en première année de thèse au sein des huit écoles doctorales de l’université de Bordeaux aura suivi les quatre modules* de cette formation à distance accessible via la plateforme pédagogique Moodle.
Des ressources pédagogiques dynamiques et polyvalentes
Le contenu a été conçu pour et avec les doctorants. Il repose sur des séquences vidéos de 3 à 6 minutes sous la forme d’échanges entre enseignants et doctorants, témoignages d’experts et de doctorants, mais aussi sur de « micro trottoirs » tournés par les doctorants. Elle comporte aussi des animations, des quizz, des forums, des lectures d’articles pour approfondir les questions traitées… Un temps de travail estimé à une douzaine d’heures pour les apprenants. Les premiers retours des doctorants et des experts sollicités comme bêta-testeurs sont à ce jour positifs. Sur la base de l’expérimentation de cette première session, une version améliorée sera proposée pour la prochaine année universitaire.
* 1 - Les enjeux de l’intégrité scientifique / 2 - Les manquements à l’intégrité scientifique : c’est quoi ? Pourquoi ? / 3 - Prévenir les inconduites : quelques règles de base / 4 : La régulation de l’intégrité scientifique