Lutter contre la pollution plastique, le défi de l’association 4P Shore & Seas

A l'occasion de la journée de la Terre, rencontre avec Edgar Dusacre et Aurélien Stremsek fondateurs de l'association 4P Shore & Seas. En 2019, ils ont organisé la première Route du Plastique, une marche scientifique de 260 km sur le littoral aquitain pour nettoyer les plages et sensibiliser le public à la pollution marine. Depuis, les projets de l’association se sont multipliés.

  • 21/04/2021

les co-fondateurs de 4P Shore & Seas, Aurélien Stremsek  et Edgar Dusacre les co-fondateurs de 4P Shore & Seas, Aurélien Stremsek et Edgar Dusacre

« L’histoire, elle est un peu folle, retransmet Edgar. J’étais au Chili en mobilité pour ma dernière année de licence - en physique chimie science de la vie en biologie marine à l’université de Bordeaux- et Aurélien (actuellement étudiant en Master d'ingénieur de formation au développement durable et transition écologique) sur la côte landaise. Après une session de surf, on s’appelle, et là, on avait le même constat : dans l’océan Pacifique ou dans l’océan Atlantique, on avait une plage qui était vraiment hyper sale ». C’est à partir de là que les deux surfeurs ont décidé de (ré)agir. 

En août 2019, ils décident de parcourir le littoral aquitain à pied en totale autonomie, pour ramasser des déchets. « La première édition c’était un peu freestyle, on a construit le chariot avec ce qu’on avait. Mais c’était cool de pouvoir sensibiliser les personnes sur les plages.»

Vivre sur notre planète n'est pas un droit, mais un privilège 

L’année suivante, ils ont donc amélioré leur technique : le chariot est maintenant plus résistant et construit avec des matières éco-responsables (fibre de lin, résine et bambou). Ils se sont aussi associés avec des laboratoires de recherche universitaires et des partenaires professionnels locaux. 

Une démarche avant tout scientifique

« On ne voulait pas lancer une énième association qui fait uniquement du ramassage. L’intérêt, c’est de parcourir l'ensemble du littoral de bout en bout sur le sable, pour étudier la présence et la répartition des déchets plastiques », poursuit Edgar.

C’est donc en collaboration avec le laboratoire EPOC (Environnements et Paléo-environnements Océaniques et Continentaux) - rattaché à l'université de Bordeaux - qu’ils ont développé des protocoles s’inspirant de ceux de la convention européenne OSPAR. Cela permet "d’avoir plus de rigueur" et d’obtenir une analyse viable sur un territoire plus élargit. 

Le protocole des macro-déchets est assez simple : « On trace un rectangle au pied d’une dune de 40 mètres de long. Il y a une personne à l’intérieur qui avance pendant 30 minutes et qui récupère en surface les déchets non organiques. Nous récupérons ensuite des échantillons qui sont conservés hermétiquement. » explique Edgar. Ils sont envoyés au laboratoire pour être analysés. Le reste est placé dans des sacs de jute et récupéré par leur partenaire Elise Atlantique pour être recyclé.

L'atout de ce procédé, c'est qu'il peut être utilisé pour faire de la science participative et citoyenne. 

L’association a également mis en place un protocole sur le ramassage des microplastiques issu du projet Arplastic du laboratoire EPOC. Celui-ci a été adapté au grand public pour la nouvelle édition des Routes du Plastique en août 2021. 

Le plastique omniprésent sur les plages du littoral aquitain

Lors de la première marche, 400 kg de déchets ont été ramassés et 700 kg au cours de la deuxième. « Les premiers résultats ont révélé la présence de microplastique : 76 particules de microplastiques trouvées dans la laisse de mer - ligne d’algues laissée par la marée haute - sur 8 transects de 5 cuadras de 0.25 m2 à 80 de coefficient marin.»

Selon les deux co-fondateurs, on trouve différents types de microplastiques : « essentiellement des fibres qui proviennent des vêtements lavés en machine ou des microbilles, et les "larmes de sirènes" provenant directement de l'industrie plastique ou cosmétique. » Mais, s'accumulent également de plus gros débris comme les filets de pêches, gros pourvoyeurs de pollution selon eux.

« Aujourd'hui, les microplastiques ont un effet ravageur sur l'océan, » affirme Edgar, « car ils absorbent des polluants tels que métaux lourds, hydrocarbures, molécules de bisphénol A et B, phtalates, ensuite ingérés par les organismes vivants qu'ils perturbent. 

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La vulgarisation au cœur de l'association

L’association 4P Shore & Seas ne se résume pas uniquement à cette Route du plastique ! Beaucoup d’autres actions sont déjà en place et d’autres sont à venir. Toujours en collaboration avec le laboratoire EPOC, les Cafés science ont vu le jour avant le confinement. Le principe ? « Deux doctorants viennent présenter leurs travaux de façon à les vulgariser auprès du grand public », explique Edgar. L’objectif étant de laisser place au débat.

L’association rédige également beaucoup de contenus scientifiques pour interpeller et sensibiliser les communautés. « Notre but c’est de travailler avec les jeunes générations, de l’école primaire en passant par les bancs de l’université, pour sensibiliser sur les pollutions marines mais aussi travailler avec les laboratoires de recherche pour obtenir des prélèvements utiles dans l’avancée de la science ».

Les 4 axes de l'association

4P pour :

  • Pollution : limiter la pollution aquatique et domestique, non seulement en ramassant les déchets et en incitant les personnes à diminuer leur consommation de plastique.
  • Préservation : contribuer à une préservation plus importante du littoral sableux en démontrant l'impact négatif de la surexploitation des côtes.
  • Protection : protéger l'environnement des différentes perturbations dues à l’exploitation humaine (tourisme et pêche par exemple).
  • Prévention : sensibiliser et informer la population des risques et des impacts des micro-plastiques et macro-plastiques à travers des éléments-débat, des publications, ou la route du plastique.

L’association a également participé au projet micro-plastique avec Fabrice Amadéo et l’université de Bordeaux lors du Vendée Globe. Sur le long terme « notre objectif est d’exporter les routes du plastique sur d’autres littoraux français, en partenariat avec des universités et même à l’international, comme au Chili par exemple », exprime Edgard.

 Par ailleurs, l'étudiant -maintenant en master à l'université de la Rochelle- rajoute que l’association mène déjà des actions en Espagne dans le golfe de Gascogne avec la chercheuse Miren Cajaraville (laboratoire CBET de l'université du pays basque UPV/EHU), ou plus localement dans le golfe du Morbihan. En attendant, l’association travaille sur un projet art et science centré sur la pollution de la pêche avec des acteurs jouant un rôle dans ce secteur.

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Formez-vous auprès de l'association aux protocoles scientifiques avant de parcourir à pied et à la belle étoile le littoral aquitain pendant 15 jours.

EPOC

Le laboratoire Environnements et paléoenvironnements océaniques et continentaux (EPOC) est une unité de recherche CNRS, EPHE et université de Bordeaux.